Chères et chers membres,
Nous avons l'immense tristesse de vous communiquer la disparition de notre chère Élisabeth Couturier, Présidente d’honneur de l’AICA France, survenue dans la soirée du jeudi 19 septembre 2024 à l'Hôpital Saint-Louis de Paris, après deux ans de lutte contre la maladie.
Journaliste, productrice, programmatrice, documentariste et critique d’art, Élisabeth Couturier a fait preuve, tout au long de sa carrière à la télévision, dans le cinéma, à la radio et dans la presse écrite, d’un goût profond pour le partage et la pédagogie afin d’ouvrir au plus grand nombre les portes du monde de l’art et de la culture. Sa personnalité rayonnante et son dynamisme, son regard singulier et son sens de la formule, animés par une insatiable curiosité pour la création, ont fait d’Élisabeth Couturier une journaliste et critique d’art reconnue, admirée et aimée par ses pairs, par les artistes et par le public.
Sa combativité, sa discrétion et sa dignité face à la maladie, demeurent un exemple de courage face aux épreuves de la vie.
Le bureau et les membres de l’AICA France présentent leurs plus sincères condoléances à sa famille et à ses proches, et tout particulièrement à son fils Félix et à son époux Pierre Desfons. Élisabeth restera pour l’association, qu’elle a présidée de 2018 à 2024, après en avoir été secrétaire générale, une figure inspirante et bienveillante.
La cérémonie publique des obsèques d’Élisabeth Couturier aura lieu vendredi 27 septembre 2024 à 14h30, à l'église Saint-Paul Saint-Louis, 99, rue Saint-Antoine, 75004 Paris.
Biographie d’Élisabeth Couturier :
Née en 1950 à Grenoble, Élisabeth Couturier fréquente avec son grand-père paternel les musées de la ville où s’éveille son amour pour la peinture. À vingt ans, elle s’installe à Paris, marquée par l’effervescence de Mai 1968. Diplômée de Sciences politiques, de Sociologie et d’Arts plastiques, Élisabeth Couturier côtoie le cercle du collectionneur Bob Calle et de l’homme politique Jean Bousquet, créateur du Carré d’Art de Nîmes et de la marque de mode Cacharel, qui l’initient au monde de l’art. Assistante de l’artiste féministe Lea Lublin, Élisabeth Couturier travaille parallèlement dans le cinéma, notamment en tant qu’assistante réalisatrice de Jean Eustache sur le film Une sale histoire (1977).
À partir de 1973, elle s’engage dans une carrière de journaliste. À la télévision, elle réalise des reportages pour « Expressions », l’émission culturelle hebdomadaire de la première chaîne. En 1981, elle rencontre le réalisateur Pierre Desfons, qui deviendra son mari le 31 décembre 1984 à Naples. À cette époque, elle s’engage dans une carrière de reportrice, productrice et programmatrice à CANAL+ avant de devenir responsable documentaire à France Télévisions, où elle créera notamment les émissions La case de l’oncle doc et Ligne Rouge, aux côtés de Laure Adler. Inspirée par Chantal Akerman et le cinéma du réel, elle façonne alors une nouvelle esthétique documentaire centrée sur le vif du sujet, sans voix off. En 2001, elle sera décorée par le ministre Laurent Fabius de la croix de Chevalière de la légion d’honneur pour son engagement pour la promotion de la culture au sein de l’audiovisuel.
En 1985, Élisabeth Couturier entame une longue et féconde collaboration avec la rédaction deParis Match, où elle analysera jusqu’en 2018 les tendances du monde du l’art et brossera le portrait des artistes contemporains les plus en vue. En 1999, elle est nommée directrice des programmes de La Chaîne Parlementaire, et participe à son lancement en 2000. Élisabeth Couturier s’éloigne toutefois du petit écran et produit deux émissions hebdomadaires pour France Culture : « En revenant de l’expo » à partir de 2007, puis « Les mardis de l’expo », qui deviendront « Les jeudis de l’expo » (2009-2011). Elle collabore également avec le producteur Ion Babeanu sur des reportages institutionnels. Son amour pour l’art retrouve néanmoins le chemin de la télévision à travers les cinq saisons des « Petits Secrets des grands tableaux », réalisées notamment par Clément Cogitore, et qu’elle coproduit sur Arte entre 2015 et 2019, ainsi que l’écriture d’un documentaire dédié au duo Pierre & Gilles dont elle était proche.
Secrétaire générale de l’AICA France (Association Internationale des Critiques d’Art) de 2012 à 2018, sous le mandat de Raphaël Cuir, elle co-crée le Prix de la Critique d’art. Présidente de l’association de 2018 à 2024, elle redynamise la vie de l’association avec la mise en place de bourses et d’événements destinés à valoriser l’exercice de la critique d’art et à rassembler ses membres. Portée par un engagement sans faille, une générosité et une bienveillance remarquables, sa présidence a été unanimement louée lors de la dernière assemblée générale de l’AICA France qui l’a nommée, en juin 2024, Présidente d’honneur. Marraine de nombreuses et nombreux membres, à l’écoute des nouvelles générations et toujours motivée à l’idée de repenser les pratiques de la critique d’art, elle a su replacer la critique au cœur de l’écosystème de l’art.
Journaliste pour les magazines artpress, L’Œil, Connaissance des arts et Historia, Élisabeth Couturier a également dirigé la collection « Le guide » aux éditions Flammarion, pour laquelle elle a signé plusieurs best-sellers : L’art contemporain (2009, 50 000 exemplaires), Le design (2015, 35 000 exemplaires) La photographie (2015) et L’art contemporain. Ce qu'il doit aux chefs-d'œuvre du passé (2021).
Nommée Chevalière des Arts et des Lettres en 2023, elle prolongeait son engagement envers l’art, les artistes et les galeries à travers les commissariats d’expositions (« Est-ce bien de l’art ? » en 2005 avec Hervé Loevenbruck ou, plus récemment, auprès de Joana Vasconcelos), les conférences (HEC, Fondation Colas, Biennale internationale d’art contemporain d’Anglet…) et le Salomon Foundation Residency Award, le prix de la Fondation pour l’art contemporain Claudine et Jean-Marc Salomon, dont elle était membre du jury depuis sa création en 2015.
Quelques jours avant sa disparition, Élisabeth Couturier n’avait rien perdu de son enthousiasme et de sa passion, discutant de Bonnard et de l’importance des papiers découpés dans l’œuvre de Matisse avec son mari, l’artiste Pierre Desfons, et son amie Laure Adler. Elle préparait par ailleurs la mise à jour de son deuxième livre sur l’art contemporain chez Flammarion.