Brève histoire des Archives de la critique d’art

Entretien avec Jacques Leenhardt et Jean-Marc Poinsot

Jean-Marc Poinsot. Nous avons créé ensemble l’Association des Archives de la critique d’art en 1989, mais l’aventure a commencé un peu plus tôt.

Jacques Leenhardt. Elle a débuté par une petite note que j’ai vu passer dans Le Monde disant que le Getty Institute envisageait de se porter acquéreur des archives de Charles Estienne. Il faut rappeler que Estienne était un critique bien connu des années 1940 et 1950. Cette brève information rendait tout à coup évident le risque que ces archives, et sans doute d’autres par la suite, partent pour les États-Unis et se retrouvent au Getty à Los Angeles ou ailleurs dans des universités ou des musées friands de fonds documentaires. À cette époque j’étais président de la section française de l’Association international des critiques d’art (AICA). Cette information a été pour moi comme un électrochoc, je me suis dit : si on laisse les institutions américaines, avec leurs puissants moyens financiers, expatrier aux États-Unis les documents d’archives de la critique d’art française, d’ici peu on ne pourra plus étudier notre histoire de l’art contemporain en France.

J.-M. P. C’était à quelle date ?

J. L. C’était en 1985 ou 1986. Les premiers documents que j’ai trouvés attestant des échanges entre nous sur ce sujet des Archives datent de 1987. Tu faisais alors partie du bureau de l’AICA-France et tu étais à la tête de la documentation du CAPC à Bordeaux. Logiquement je me suis dit que, parmi nous tous, tu étais celui qui avait la meilleure compétence dans ce domaine. Il ne s’agissait pas encore d’archivage, mais de documentation. C’est à ce moment que je t’ai téléphoné pour te proposer que nous étudiions ensemble cette question. Vers cette époque, nous avons eu un rendez-vous avec Madame Paradis qui représentait le Getty en France. Étant donné que, dans un premier temps, la collaboration avec le Getty ne semblait pas aller de soi, nous avons envisagé la création d’un organisme de conservation des archives des critiques d’art de l’AICA et avons cherché des aides du côté des institutions européennes. Ensuite, les Archives de la critique d’art ont heureusement pu collaborer avec le Getty Institute.

J.-M. P. Nous avons eu quelques rendez-vous sur des projets de bases de données puis autour d’Internet qui commençaient alors.

Quelles mémoires pour l’art contemporain ?, Actes du XXX e Congrès de l’AICA, Rennes, 25 août-2 septembre 1996, fonds AICA International [FR ACA AICAI BIB IMP057], collection INHA – Archives de la critique d’art. Lire en ligne. D.R.

Quelles mémoires pour l’art contemporain ?, Actes du XXX e Congrès de l’AICA, Rennes, 25 août-2 septembre 1996, fonds AICA International [FR ACA AICAI BIB IMP057], collection INHA – Archives de la critique d’art. Lire en ligne. D.R.

 

J. L. Les musées et les grandes institutions culturelles en France ne manifestaient pas un grand intérêt pour la conservation du travail critique, à part un ou deux cas exceptionnels comme la création de la bibliothèque Jean Laude à Saint-Étienne. D’ailleurs, Pierre Restany se plaignait du manque d’intérêt pour la conservation de sa propre production.

J.-M. P. Nous avions alors commencé à échafauder le projet de ce que pourraient être des Archives de la critique d’art et il s’est passé la chose suivante. Dominique Bozo venait d’être nommé à la DAP [1] et il voulait monter un projet original autour de la Villa Gillet, à Lyon. Il recherchait alors un directeur capable de lui proposer un programme pour cette villa ; il m’a démarché à ce propos et je lui ai présenté notre projet d’Archives de la critique d’art. C’est à ce moment-là que nous avons commencé à rentrer dans le vif du sujet et que Dominique Bozo nous a donné son feu vert. Françoise Chatel, alors conseiller pour les arts plastiques en Bretagne, a eu la possibilité de nous attribuer une première subvention pour concevoir un avant-projet. C’était en 1989. Une première équipe a été constituée et une association ad hoc mise en place.

J. L. En fait, j’avais entrepris les premières démarches auprès de trois critiques – Michel Ragon, Pierre Restany et Georges Boudaille – dès avant ce premier feu vert. En acceptant de confier leurs archives à la future institution encore rêvée, ces figures incontournables constituaient en quelque sorte une garantie de faisabilité de notre projet.

J.-M. P. Oui, tu as dû en parler avec Michel Ragon, car il venait de donner ses archives sur l’abstraction au musée des beaux-arts de Nantes. Elles devaient compléter la donation Gildas Fardel. Il s’était alors montré déçu qu’après la fermeture de l’exposition organisée à cette occasion, Autour de Michel Ragon (2010), il ne se soit plus rien passé.

J. L. En effet, il y a eu un colloque au musée de Nantes au moment de l’exposition auquel j’ai participé et qui fut l’occasion d’un premier échange avec Ragon sur l’avenir de ses archives.

J.-M. P. C’est là que les choses ont commencé à mûrir. Ainsi, par exemple, au moment où nous montions notre projet, la Biennale de Paris était en phase de liquidation. Il a fallu du jour au lendemain que nous mobilisions un camion pour éviter que les documents passent à la poubelle.

J. L. Il se trouvait que Georges Boudaille, qui avait été président de la section française de l’AICA, était délégué général de la Biennale, ce qui a rendu ce sauvetage possible en 1990 [2].

Création des Archives de la critique d’art. Manifestation inaugurale, Université Rennes 2, 16 décembre 1989. De gauche à droite : Jacques Leenhardt, Michel Ragon et Thierry de Duve, photographe : Loïc Lamandé, archives internes ACA, collection INHA …

Création des Archives de la critique d’art. Manifestation inaugurale, Université Rennes 2, 16 décembre 1989. De gauche à droite : Jacques Leenhardt, Michel Ragon et Thierry de Duve, photographe : Loïc Lamandé, archives internes ACA, collection INHA – Archives de la critique d’art. D.R.

Colloque La Critique d'art en Europe, Université Rennes 2, 20 novembre 1992. De gauche à droite, premier rang : Pierre Le Treut, Harry Bellet, Frank Popper, Marie-Odile Briot: deuxième rang : Pierre Restany et José-Anne Decock-Restany: trois…

Colloque La Critique d'art en Europe, Université Rennes 2, 20 novembre 1992. De gauche à droite, premier rang : Pierre Le Treut, Harry Bellet, Frank Popper, Marie-Odile Briot: deuxième rang : Pierre Restany et José-Anne Decock-Restany: troisième rang : Ramon Tió Bellido, Anne Dagbert, photographe : Loïc Lamandé, archives internes ACA, collection INHA – Archives de la critique d’art. D.R.

J.-M. P. Pour revenir à 1989 quand j’ai commencé à parler de notre projet avec Dominique Bozo, il m’a donné son accord à la condition qu’il n’y ait pas de recoupements avec le fonds documentaire du Centre Pompidou. Il s’agissait en quelque sorte d’éviter que nous n’empiétions sur la première moitié du xxe siècle. Il fallait donc que les Archives commencent avec la critique vivante, celle qui était apparue après la Seconde Guerre mondiale, c’est-à-dire avec Michel Ragon, Pierre Restany, Frank Popper et Alain Jouffroy.

Par la suite, Restany a donné assez vite une première partie de ses archives [3]. Puis plusieurs versements ont suivi, quoiqu’avec des moments difficiles après son décès. Une portion importante des archives restées chez lui risquait d’être dispersée, mais heureusement nous avons réussi à convaincre son épouse puis ses héritiers de poursuivre l’œuvre engagée.

J. L. Toutefois, ce qui me semble avoir été décisif, c’est le fait que tu réussisses dès cette époque à mobiliser autour du projet des Archives à la fois les étudiants et tes collègues de l’université de Rennes 2.

J.-M. P. Oui, à l’époque où nous montions les Archives, un collègue historien que je connaissais bien, André Lespagnol, est devenu président de l’université Rennes 2. Il m’avait alors proposé d’être vice-président du conseil scientifique mais je lui ai répondu que je privilégiais le projet des Archives de la critique d’art. Il a soutenu ce choix et il a proposé d’établir rapidement une convention comportant notamment la mise à disposition de matériel informatique et de logiciels, ainsi que la possibilité de faire bénéficier les personnels des formations spécialisées de l’université et de l’Unité régionale de formation à l’information scientifique et technologique (URFIST). Alors que le projet était prêt dans nos esprits, j’ai démarché la ville de Rennes et la région. Dans le cadre de mes fonctions de conseiller artistique entre 1979 et 1981 à la direction régionale des affaires culturelles, j’avais été en relation avec Pierre Le Treut, vice-président à la culture de la Région Bretagne, et je l’ai ensuite retrouvé dans les comités scientifiques du Fonds régional d’art contemporain (FRAC) dont j’avais mis en place la première mouture en 1980. Il était également maire de Châteaugiron et il y avait fait installer le FRAC. Il m’avait sollicité pour que je lui donne mon avis sur une candidature possible pour la direction de celui-ci. Catherine Elkar, qui était entrée comme stagiaire à la Direction régionale des affaires culturelle (DRAC) quand j’ai mis en place le FRAC, était devenue une collaboratrice à part entière du FRAC dans la première équipe, et Pierre Le Treut envisageait de lui confier l’intérim. Je l’ai conforté dans son choix et elle a pris la direction du fonds. Comme elle savait très bien que je recherchais des locaux, elle a alors proposé que l’ancien bâtiment scolaire où allait s’installer le FRAC, et qui n’était pas encore complètement rénové, nous accueille aussi. Au début les Archives de la critique d’art ont été installées au rez-de-chaussée, qu’elles partageaient avec l’équipe du FRAC. Deux ans après, elles sont montées au premier étage, qui avait été rénové et adapté à nos besoins grâce au soutien de la région, du département et de la DRAC. L’installation était alors très confortable. Entre-temps, le petit groupe du conseil scientifique de l’association avait organisé un certain nombre de rencontres publiques à l’université Rennes 2 et dans d’autres lieux comme le musée des beaux-arts ou le Théâtre national de Bretagne (TNB). Une des premières s’était tenue avec Michel Ragon, Thierry de Duve, Marc le Bot et nous-mêmes. Elle fut suivie en 1990 par l’organisation, avec l’aide de l’équipe constituée par le bureau de l’AICA (Élisabeth Lebovici, Didier Semin, Ramón Tío Bellído…), du premier véritable colloque, intitulé La place du goût dans la production philosophique des concepts et leur destin critique [4].

J. L. Qui a été aussi la première publication des Archives !

J.-M. P. Il allait être suivi, après la manifestation inaugurale où nous avions invité Pierre Restany, Michel Ragon, Frank Popper, Alain Jouffroy et un certain nombre de ces ténors de la critique qui étaient partie prenante de l’aventure, par une série d’autres événements sur La Critique d’art en Europe (1992) ou le XXX Congrès international de l’AICA : Quelles mémoires pour l’art contemporain ? (1996) [5]. L’ensemble de ces manifestations faisaient des Archives de la critique d’art un vrai lieu de débat.

Ont alors été mis en place non seulement les fonds d’archives, mais aussi les fonds d’écrits, qui devaient en quelque sorte jouer le rôle d’une anticipation de futurs fonds d’archives tout en constituant un corpus vivant de la littérature critique. Il s’agissait d’établir un lien direct avec tous les membres de l’AICA-France afin de les sensibiliser au développement des Archives [6]. Pour renforcer l’incitation faite aux auteurs de verser leurs écrits, nous avons lancé la revue Critique d’art en 1993, qui valorisait ainsi les nouveaux écrits tout en offrant un service bibliographique inédit.

J. L. Ce lien avec la section française de l’AICA constituait pour nous plus qu’une opportunité ; il était un élément fondamental des Archives qui devaient se développer en symbiose avec l’activité critique elle-même. Plus tard, l’AICA internationale a déposé à son tour ses archives.

J.-M. P. Cela s’est fait lorsque tu es devenu président de l’AICA international.

J. L. Oui, à partir de 1990, puisque j’ai bénéficié de deux mandats de président, de 1990 à 1993 et de 1993 à 1996. C’est le moment où l’AICA a dû quitter la rue Berryer, libérer ses locaux et donc déménager ses archives. Ça a été l’occasion de les déposer aux archives à Châteaugiron.

J.-M. P. L’AICA-France avait-elle déjà versé quelques archives ?

J. L. Quand je suis arrivé à la présidence de l’AICA-France, en 1980, il n’y avait pas d’archives et il n’y avait pas de locaux. Il devait sans doute y avoir des documents chez Michel Ragon, Georges Boudaille, Jean-Jacques Lévêque et Dora Vallier, qui avaient été présidents avant moi, mais aucun d’entre eux ne m’a transmis d’archives. Le vrai démarrage concernant l’AICA est donc lié au versement des archives de l’AICA internationale, qui remontent à 1948. Hélène Lassalle a été la première à les exploiter, à l’occasion notamment des célébrations du cinquantenaire de l’AICA comme Organisation non gouvernementale (ONG) de l’UNESCO. Pour l’AICA-France, ce sont donc mes propres archives (fort mal organisées au demeurant !) qui sont les premières à intégrer les Archives de la critique d’art. Je ne sais pas si dans le fonds de Ragon il y a quelques documents se rapportant à sa présidence.

 
Salle de consultation des Archives de la critique d'art à Châteaugiron, 1992, archives internes ACA, collection INHA – Archives de la critique d’art. D.R.

Salle de consultation des Archives de la critique d'art à Châteaugiron, 1992, archives internes ACA, collection INHA – Archives de la critique d’art. D.R.

J.-M. P. Non, je ne pense pas. Il n’y avait pas, à l’époque, beaucoup d’intérêt dans le milieu de la culture et pas davantage dans les cercles académiques pour les traces accumulées de la pratique critique.

J. L. Le peu d’intérêt des institutions françaises pour les archives de l’art en train de se faire et de sa critique est sans doute, pour partie, lié à l’histoire même de l’AICA qui, en tant qu’association de critiques d’art, s’est formée par opposition aux historiens de l’art en affirmant un intérêt pour l’art vraiment contemporain. Cette division entre historiens de l’art et critiques d’art a peut-être favorisé, à l’époque, un certain désintérêt pour la collecte d’archives. De leur côté aussi, les critiques d’art avaient probablement si fortement le sentiment de vivre et d’écrire dans un temps présent qu’ils se souciaient peu de la dimension historique que leurs écrits pourraient prendre plus tard. En outre, à partir de 1981 et du ministère de Jack Lang, on sent clairement une volonté d’être dans l’actualité, d’accompagner la création artistique la plus nouvelle et la plus « jeune », ce qui, évidemment, ne pousse pas à développer un regard rétrospectif et historique. Il faut d’ailleurs rappeler que l’université interdisait jusqu’en 1970 environ de faire des thèses de doctorat sur des auteurs ou des artistes vivants. Cette situation va changer petit à petit au cours de la décennie suivante et avoir aussi une répercussion notable sur les nouvelles adhésions à l’AICA-France Quand j’ai été élu à sa présidence, l’AICA-France comptait à peu près 90 membres, presque tous des critiques écrivant dans la presse et dans les revues. À l’époque, la critique d’art était beaucoup plus abondante et vivante dans une presse qui lui faisait d’ailleurs une place plus large. Les universitaires n’entraient pas à l’AICA et l’AICA n’aimait pas les universitaires ! Il faut se souvenir qu’aucun de mes prédécesseurs n’était universitaire. Mais, à partir de 1981, plusieurs critiques d’art membres de l’AICA – Gérald Gassiot Talabot, Michel Troche et Anne Tronche en particulier – entrent dans les instances du ministère de la Culture. D’autre part, j’ai invité des universitaires qui écrivent sur l’art contemporain, comme par exemple Hubert Damisch, Georges Raillard, Louis Marin ou Georges Duby, à se présenter et ils sont élus alors à l’AICA. Je crois que la possibilité de mener une réflexion sur l’archive a été rendue possible par ce relatif élargissement de la population de l’AICA, car quand je l’ai quitté il comptait plus de 300 membres, parmi lesquels un bon nombre d’enseignants.

J.-M. P. Maintenant cela concerne au moins quarante pour cent des nouveaux candidats. La disparition de beaucoup d’organes qui payaient normalement leurs pigistes a contribué à cette évolution, à côté du développement de la place de l’art contemporain dans les cursus universitaires.

J. L. En effet, la critique d’art journalistique ne permet plus guère de vivre et, par conséquent, pour pouvoir mener une activité de critique d’art, il faut avoir un salaire par ailleurs. Cette situation a profondément modifié la composition de l’AICA de même que la tendance a été de rapprocher les écoles d’art du monde et des critères de recherche académiques.

Salle de consultation des Archives de la critique d'art dans leurs locaux actuels à Rennes, archives internes ACA, collection INHA – Archives de la critique d’art. D.R.

Salle de consultation des Archives de la critique d'art dans leurs locaux actuels à Rennes, archives internes ACA, collection INHA – Archives de la critique d’art. D.R.

 

J.-M. P. Il y a eu aussi l’émergence de commissaires d’expositions d’art contemporain.

J. L. Ça a été un de mes combats que de faire reconnaître au niveau de l’AICA internationale que le commissaire d’exposition faisait un acte critique et que donc, en tant que tel, il avait vocation à faire partie de l’association. Le monde de l’art était en train de créer de nouveaux acteurs et ils devaient trouver leur place dans l’AICA.

J.-M. P. La reconnaissance internationale des Archives est advenue avec l’organisation du congrès de l’AICA de 1996. Toutes les modifications que tu viens d’évoquer ont alors fait que l’on commence à penser la conservation d’archives autrement que comme une simple documentation.

C’est aussi la période où les artistes sont de plus en plus nombreux à intégrer des archives dans leurs travaux. Nous en rendrons compte d’ailleurs en 2001 avec le colloque Les artistes contemporains et l’archive. Les années suivantes ont été marquées par le programme européen Vektor, avec les archives du marché de l’art à Cologne, les archives de la documenta à Kassel, le Museo de Arte Moderna à Bolzano et deux autres partenaires. Ce programme a permis d’adopter des normes internationales pour le traitement des archives tout en comparant les méthodes et les objectifs. Par la suite, les années 2000 ont été plus difficiles car il fallait prendre soin d’une collection massive et accueillir toujours plus largement les chercheurs et les commissaires d’exposition en quête de documents « historiques ».

C’est alors le début des relations scientifiques que nous avons établies avec l’INHA, qui a soutenu des programmes de traitement de tel ou tel fonds d’archives. De même, un apport financier conséquent du Getty (2005) nous a permis de cataloguer une partie importante du fonds Restany, au moment où il s’agissait de convaincre sa veuve de nous confier les dernières composantes de ses archives. L’opportunité d’organiser en 2006 un grand colloque international sur Le demi-siècle de Pierre Restany à l’INHA, où j’ai assuré pendant quelques années la direction du département des Études et de la Recherche, a été décisive en proposant un modèle de valorisation qui fut suivi en 2010 par un colloque consacré à Michel Ragon : critique d’art [7].

J. L. Et maintenant quelle est la situation des Archives de la critique d’art ?

J.-M. P. Les Archives viennent de sortir d’une crise de croissance dans un contexte économique défavorable en créant un Groupement d’intérêt scientifique (GIS) rattaché à l’université Rennes 2 et en transmettant la propriété de leurs collections à l’INHA. Le GIS a été fondé par les trois partenaires suivants : l’AICA international, l’INHA et l’université Rennes 2, mais il intègre dans son conseil scientifique de nombreux partenaires universitaires et professionnels français et étrangers susceptibles de l’aider dans sa mission de collecte et de valorisation culturelle et scientifique. Toutes les conditions sont désormais réunies pour franchir les nouvelles étapes de notre développement dans des conditions plus sereines.

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1. La délégation aux arts plastiques était alors le service du ministère de la Culture en charge de la création contemporaine.

2. Les archives avaient été démembrées et il fallut plusieurs années pour récupérer les différentes composantes, à l’exception d’un versement qui avait été fait au Musée national d’art moderne, et dont les

 Archives de la critique d’art ont effectué un inventaire sommaire.

3. Aujourd’hui le fonds Restany, constitué après de multiples apports du critique et de sa famille, est l’ensemble le plus riche et le plus complet. Il couvre une activité très internationale des années 1950 aux années 1990.

4. Élisabeth Lebovici, Didier Semin, Ramón Tío beLLído (dir.), La place du goût dans la production philosophique des concepts et leur destin critique (actes de colloque, Rennes, 1990), Châteaugiron, Les Auteurs & les Archives de la critique d’art, 1992.

5. Quelles Mémoires pour l’art contemporain ? (Actes de colloque, Rennes, 1996), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 1997.

6. En 2015, la présence de près de 400 (480 en 2019) fonds d’écrits représente de façon significative la production critique française des cinquante dernières années.

7. Richard Leeman (dir.), Le demi-siècle de Pierre Restany (actes de colloque, Paris, 2006), Paris, Édition des Cendres, 2009 ; Richard Leeman, Hélène Jannière (dir.), Michel Ragon : critique d’art et d’architecture (actes de colloque, Paris, 2010), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2013.